J’ai eu la grâce de m’envoler pour le Cameroun en septembre dernier. Suite à la perte de mon grand-père, j’ai senti que c’était le moment de rentrer chez moi. J’étais triste qu’il soit parti sans que je n’aie eu l’occasion de lui dire au revoir. Qu’il n’ait pas rencontré Gabrielle. J’ai senti que qu’il était temps que le reste de ma famille connaisse Gabrielle et qu’elle les rencontre également. C’était pour moi le voyage de ma vie, le retour aux sources. Je suis partie à la découverte de qui je suis. Mon Dieu qu’est ce que c’était bon ! Mon cœur vibre alors que je j’écris cet article. Je suis partie de chez moi petite fille, j’y suis retourné en tant que femme. Qui plus est, maman.
Je suis arrivée ici en France j’avais 13 ans, j’étais donc bien empreinte de la culture et des mentalités camerounaises. Même si j’ai embrassé la France, le Cameroun fait entièrement partie de mon identité. Alors imaginez ce que j’ai pu ressentir pendant 9 ans … je me sentais dépourvu d’une partie de moi. Pendant 9 ans j’ai chéri les souvenirs que j’avais du Cameroun. Mon enfance, ma famille, ma culture, mes repères, etc. J’ai souvent eu l’impression que j’étais le résultat de mon “aventure” en France. Comme si ce qui me restait de ma vie au Cameroun était des souvenirs fabriqués par la petite fille que j’étais.
Mon voyage au Cameroun était une rencontre avec moi-même. Il m’a permis de réaliser que j’ai commencé à me construire bien avant que je quitte ma terre mère.
A travers leurs yeux
Revoir mon père, rigoler avec lui, ne plus avoir peur de lui … Mon père n’est pas vraiment papa gâteau. Cet homme m’a terrorisé je vous assure. Je fuguais constamment pour aller voir ma grand-mère. Et bien sûr elle me ramenait toujours chez mon père… Je ne savais pas que pour mon père, je suis sa fille bien-aimée, intelligente et vaillante. Des mots qui signifient beaucoup pour moi. Je n’ai jamais eu cette relation de tendresse et complicité avec mon père. Il m’inspirait plutôt de la peur mêlée à de l’admiration. Mais ça c’était avant, avant que je sois une femme, avant que j’ai moi même un enfant. C’était important qu’il sache que j’ai grandi et que je n’ai plus peur mais que je le respecte et je l’aime.
J’ai vu des regards remplis d’amour et de tendresse quand j’ai revu les membres de la famille. De l’amour pour moi mais aussi pour Gabrielle. A son tour elle les a tous adoptés, comme si un lien invisible lui permettait de savoir qu’ils étaient liés. Une grande famille, voilà ce que j’ai trouvé à la maison. Une famille aimante, avec ses qualités et ses défauts, ses désaccords et ses problèmes. Mais malgré tout, une famille liée par le sang, par la vie, par l’amour.
Souvenirs, souvenirs …
J’ai eu l’immense grâce de retrouver mes frères et sœurs, de passer du temps avec eux, de me rendre compte que je ressemble à d’autres personnes que mon père et ma mère. Je me répète, mais ce voyage m’a transformé et a renforcé / créé des liens avec ma famille. L’une de mes plus belles surprises, c’est quand j’ai croisé le regard de ma petite sœur, ce n’était pas prévu. Celle que j’ai vue une ou deux fois dans mon enfance, celle qui était dans mon cœur mais que je ne connaissais pas. Nous avons appris à nous connaître, nous avons découvert que nous n’avions pas que le même sang.
Puis j’ai vu celles qui pendant quelques années ont partagé mon quotidien, mes aventures, ma vie. Celles grâce à qui je sais que mon enfance n’est pas le fruit de mon imagination, car nous l’avons partagé. J’ai eu l’impression de revivre, que des morceaux de moi reprenaient leurs places. Nous avons raconté ce que nous avions vécu, expliqués à nos plus jeunes frères que papa n’avait pas changé, exposés les stratégies mises en place pour éviter les coups de ceinture de papa. Nous nous sommes remémoré nos bons moments et nos pires moments (ceux-là nous ont beaucoup fait rire). De comment on menaçait ou flattait notre petite sœur pour qu’elle ne nous trahisse pas aux parents. (Bien sûr elle le faisait quand même).
Et j’ai compris. J’ai compris ce que ça fait de visiter le passé, d’être totalement soi, d’avoir en face des personnes qui savent de quoi tu parles et partagent ta mémoire.
J’ai marché sur ses pas
Le moment le plus difficile pour moi c’est quand je suis allé dans mon village, à Bafia. Rien n’avait changé, à part quelques boutiques qui avaient fermé. Je tenais à revoir la dernière demeure de ma grand-mère. La femme la plus douce, généreuse, forte, compatissante, remplie d’amour, tendre, patiente, drôle, marquante … Je peux continuer sur plusieurs pages. Ma grand-mère était un grand repère pour moi et je l’aimais tellement. Je l’appelais maman et pas juste parce que ça fait partie de ma culture. Je me suis rendu dans l’école dans laquelle elle a enseigné pendant des années, où elle a laissé son empreinte. Alors que j’avais à peine 1 an, elle m’emmenait avec elle dans sa salle de classe, je pense qu’elle a contribué à ce que j’ai un esprit éveillé. Bref, je tenais à voir la salle de classe où j’ai passé du temps avec ma grand-mère, histoire de la sentir près de moi.
J’ai eu le cœur serré de parcourir la ville et de ne la voir nulle part, d’aller à sa place du marché et trouver quelqu’un d’autre. Elle n’était pas là, elle n’est plus là, elle est partie et je ne l’ai pas vu une dernière fois. Elle nous a quittés et a laissé en moi, en nous, un vide immense. J’ai réalisé que même si elle était parti depuis plusieurs années déjà, j’avais besoin de faire une dernière fois, le même chemin qu’avant, sans elle à mes côtés, pour assimilé qu’elle n’est plus là. Mais sa vie, son oeuvre, sa personne, sont en nous à jamais.
Des yeux d’enfant
Tout m’avait l’air plus petit que dans mon souvenir, mais en même temps rien n’avait changé. Les maisons et les commerces étaient collés les uns aux autres. Mon père me semblait beaucoup plus petit qu’avant, comme si la vieillesse l’avait rapetissé. Lui qui auparavant m’impressionnait par sa taille élancée, c’est avec des yeux d’enfants que je le dévisageais. Mes amis d’enfance eux n’avaient pas changé, mais les relations sont totalement différentes, normal me direz-vous. J’étais heureuse de les voir, de savoir que plusieurs s’en sortent. Ça m’a rappelé combien nous sommes des battants, des ambitieux et des personnes fortes. C’est une réelle force que j’admire chez mes frères. Malgré la difficulté de la vie, ils restent debout et joyeux malgré tout. Une force que j’ai du mal à retrouver ici en France.
Mon passé s’est réaffirmé et m’a donné un réel souffle pour aller de l’avant et être vraiment celle que je suis destinée à être.
Vous savez, l’image qu’on nous renvoie de l’Afrique est loin de la réalité. L’image qu’on nous renvoie de la France également. Certes, toutes les routes ne sont pas goudronnées, la vie peut être réellement vache, les moyens pour s’en sortir ne sont pas à foison. Mais ce que j’ai vu moi c’était de la joie de vivre, de l’entraide, l’insouciance, une certaine unité. Par contre je ne vais pas vous mentir j’étais contente de rentrer chez moi, en France. L’eau courante me manquait, les moustiques et les coupures d’électricité me rendaient folle. Mon voyage m’a permis de me rendre compte combien je suis privilégiée, bénie. Il m’a remis les idées en place et m’encourage à réellement apprécier et chérir tout ce que j’ai.
Le Cameroun est un pays qui doit être visité et mis en valeur. Je suis vraiment reconnaissante de voir des jeunes se mettre en oeuvre pour valoriser mon beau pays. Des jeunes comme Manuella EBE, Chouchou Mpacko, Gaëlle ONANA, Céline FOTSO etc. Il y en a encore d’autres et bien sûr l’idée est de faire parti de ceux et celles qui militent pour que le Cameroun soit hissé toujours plus haut.
Merci de m’avoir lu, c’était long je sais ! On se retrouve sur mon profil instagram (@young.and.mummy) pour que je vous raconte mes petites anecdotes lors d’un live.
Un proverbe dit “si on t’explique le Cameroun et que tu comprends, c’est qu’on ne t’a pas bien expliqué”.
10 Commentaires
Que puis-je dire? Rien de particulier ni extra!
On s’est connu toi et moi nous étions petites, nous étions proches car on a le même sang, mais distantes car on ne se voyait quasiment pas. Pour moi tu étais ,je le savais bien, ma grande sœur ! Mais je te voyais comme un horizon, comme si tu n’étais pas accessible, comme une idée ! Je savais bien que tu existes (puisqu’on s’était vu ! ) mais quand t’es partie, je n’aurais pas imaginé te revoir, et de surcroît en tant que femme.
Alors t’es arrivée, quand tu embrassais papa, j’avais tellement peur? , je te regardais tellement,je me disais “oh God, qui c’est ? C’est vraiment elle”
Mais il y a un sentiment qui m’a envahi là sur le champ, c’était de l’amour, je pleurais à l’intérieur de moi car je me disais “mon Dieu, ma grande sœur de sang, ma grande sœur est là”
Bref, on a passé un super moment tous ensemble et vivement qu’il se reproduise.En plus j’ai une nièce moi ?, et sans oublié que tu nous as montré tes piches… (suis mon regard?)
Merci Sab????
Message très touchant ça me rend nostalgique de mon pays d origine
Hello Louise, merci pour ton message. Tu es originaire de quel pays ?
Ivoirienne reine
C’est un beau retour aux sources… et on est vite transportés au Cameroun avec tous ces attraits culturels…; et la musique de ta vidéo de présentation en complément ! lovely,
Merci ma bichette, t’es un amour <3
Quel beau résumé qui nous parle à tous très touchant ça prouve peu importe où on se trouve on n oublie jamais d où on vient
C’est vrai, on peut être loin de chez nous mais le cœur y sera toujours. Merci pour ton commentaire et d’avoir pris le temps de me lire. 🙂
Gloire à Dieu! Magnifique récit, il donne vit à ton voyage et nous permet d’etre totalement transporté avec toi à chaque étape importante que tu as pu vivre la bas! Heureuse de lire un tel article où le passé les présent et le futur se mêlent. Ton évolution de petite fille à maman qui te permet d’etre La femme de maintenant et celle de demain. Que dire de plus à part que je suis contente d’un tel retour aux sources. Cet article parle de lui même !
Merci ma chérie, ton commentaire est vraiment touchant et retransmet exactement ce que je voulais partager avec vous. Merci vraiment d’avoir pris le temps de me lire, c’est très encourageant.